The Act of Breathing: Notes on Fugitivity
Avec The Act of Breathing: Notes on Fugitivity [L'acte de respirer: notes sur la fugitivité], les curatrices Sorana Munsya et Evelyn Simons créent un espace-temps d'où analyser les liens entre la lutte pour respirer et le concept de fugitivité noire. L'acte de respirer est le titre d'un poème de Sony Labou Tansi où l'auteur explore le souffle comme une force répétitive et instinctive essentielle à la vie et comme un droit qui, s'il est menacé, devient un outil de résistance politique. La notion de fugitivité, principalement développée dans la littérature noire américaine et caribéenne, fait référence à l’histoire de l’esclavage et aux mouvements de fuite des plantations par les marrons. La question se pose ici de traduire ce concept dans le contexte postcolonial belge contemporain.
Durant cette journée, la fugitivité noire est discutée à travers le regard et l’expertise de sociologues, curatrices et artistes: Véronique Clette-Gakuba, Sofia Dati, Magali Elali, Hamedine Kane, Valérie Kanza, Kenny Mala Ngombe, Rachael Moore et Laura Nsengiyumva. À partir de points de vue situés dans des vécus, leurs interventions mettent en évidence un langage et des pratiques propres aux réalités de la fugitivité noire à l’intérieur de lignes géographiques spécifiques et font le lien avec les pratiques diasporiques à l'œuvre en Belgique. Lors de cette journée, les performances des artistes Nkisi, M I M I et Nick Coutsier entrent en dialogue de façon spontanée et organique avec la pratique discursive des autres intervenant·es. Ce symposium est une continuité de l'exposition The Act of Breathing qui s'est tenue à Horst à l'été 2022.
Programme:
10:00: Accueil
10:30–11:00: Mot de bienvenue des curatrices / Sorana Munsya et Evelyn Simons
11:00–12:00: Fugitivité noire en Belgique / Véronique Clette-Gakuba
Présentation et échanges avec le public (FR)
Docteure en sociologie (ULB), Véronique Clette-Gakuba a récemment publié "Épreuves de colonialité dans l’art et la culture - Faire exister un monde noir à Bruxelles". Elle est ici invitée à réaliser une cartographie mettant en évidence les lieux noirs à Bruxelles. En partant de ce travail qui établit des éléments historiques concrets et d'autres plus confidentiels, le caractère fugitif et éphémère des lieux noirs dans l’espace postcolonial qu’est Bruxelles se révèle. À l’issue de la présentation, le public aura l’occasion d’échanger avec la sociologue.
12:00–13:00: Fugitivité et langage / Sofia Dati et Laura Nsengiyumva
Table ronde (EN)
Cette table ronde a pour objectif de mettre en évidence un langage propre à la fugitivité noire dans le contexte postcolonial belge. La curatrice Sofia Dati et l'artiste Laura Nsenguyimva dialoguent autour de la traduction des concepts développés dans l'ouvrage de référence The Undercommons: Fugitive Planning & Black Studies [Les sous-communs: Planification fugitive et études noires] de Fred Moten et Stefano Harney. Ce processus de traduction sera également exploré à travers le concept théorique et la pratique artistique de "Radical Absence" développé par l’artiste Laura Nsengiyumva. Discuter l’absence/présence dans son lien avec la fugitivité comme méthode de création, de résistance et de soin est au cœur de cette discussion et du symposium.
PAUSE
Lunch offert à tout le monde
14:00–14:45 Fugitivité et décolonisation / Valérie Kanza
Lecture et projection (FR)
Dans son intervention, la cinéaste Valérie Kanza fait le lien entre l’histoire de la lutte pour les indépendances de pays en Afrique et les notions de fugitivité et de panafricanisme sur le territoire belge à travers le récit du Centre International du 220 rue Belliard. L'histoire de ce lieu, avec tout ce qu'il a vu comme acteurs et actrices du panafricanisme, de la pensée décoloniale et de la libération africaine à Bruxelles, est racontée à travers le personnage de Thomas Kanza et de documents d’archives.
14:00–15:30: Fugitivité et panafricanisme / Hamedine Kane et Valérie Kanza
Discussion et échanges avec le public (FR)
Lors de cette table ronde, Hamedine Kane et Valérie Kanza explorent comment les mouvements de fugitivité, qui prennent notamment la forme de l’exil façonnent la possibilité d’un renforcement d’une pratique panafricaniste. La recherche artistique d'Hamedine Kane autour des questions de migration et d’exil ainsi que des déplacements de figures artistiques et politiques noires américaines dans des espaces européens au début du 20e siècle, entre en dialogue avec les éléments d’archives réunit par Valérie Kanza.
15:45–16:15: Courts métrages d'Hamedine Kane
Projections (FR)
Hamedine Kane présente deux de ses courts métrages.
Habiter le monde, la Marche. Le film navigue sur les chemins traversés et occupés par les réfugiés: ports, enclaves, deltas et frontières, espaces transformés en lieux de désolation et de détention. L'œuvre explore la mythologie de la marche, celle des pèlerinages et des diasporas comme des flâneries et des dérives. Kane déroule des histoires d'espoir, d'amour, de jeu et de désespoir pour reconquérir les territoires hostiles et les retransformer en terrains fertiles pour la vie et la créativité.
À l’ombre de nos fantômes assemble des notes sur un film à réaliser, sur un essai à écrire. Le 29 avril 2006, un bateau avec à bord onze corps morts est repéré au large de la côte sud-est de la Barbade, dans les Caraïbes. Le bateau fantôme a dérivé pendant quatre mois sur l'océan Atlantique avec à son bord des migrants du Sénégal, de Guinée-Bissau et de Gambie, partis des îles du Cap-Vert pour rejoindre les îles Canaries. Le film s'appuie sur les matériaux disponibles pour tenter de donner un sens à la complicité des conditions météorologiques, des courants océaniques et de la violence des États dans le voyage de ce bateau. Une deuxième famille d'images fait dialoguer un marcheur et son ombre, qui tantôt lui fait face, tantôt l'accompagne dans des espaces désertiques ou urbains.
PAUSE
16:45–17:45: Fugitivité et lieux / Magali Elali et Kenny Mala Ngombe
Table ronde (EN) Modératrice: Rachael Moore
La curatrice et activiste Magali Elali, fondatrice de The Constant Now à Anvers, ouvre une discussion avec l'artiste Kenny Mala Ngombe, qui par la peinture tente de dénouer les fictions qui entourent la notion d'altérité et les mécanismes qui créent l'"Autre". Cette table ronde explore comment la fugitivité est liée à la nécessité de lieux (plus) sûrs [safe(r) space], aux pratiques d'inclusion, au pouvoir des intermédiaires et au rôle (et responsabilités) du paysage culturel institutionnel qui, à ce jour, continue de participer au racisme structurel de la société.
17:45–18:30: Discussion ouverte avec le public et clôture des panels / Sorana Munsya et Evelyn Simons
21:00–22:00: Hybrid Live Set / M I M I
DJ et artiste transdisciplinaire basée à Bruxelles, Maria Muehombo AKA M I M I propose une performance sonique, entre paysage sonore live et rituel, inspirée des discussions et concepts évoqués au fil de la journée. Son travail est motivé par une constante conversation avec la nature, puisant son inspiration au creux des limites entre ce monde naturel et celui construit par les humains, avec une attention particulière à l'impact de l'anthropocène. Explorant la musique classique, la musique club, les paysages sonores expérimentaux ainsi que les percussions et rythmes de son héritage africain, plus particulièrement angolais et zambien, l'artiste va chercher le pouvoir de guérison du son en créant un environnement méditatif pour le public.
22:00–22:15: Performance / Nick Coutsier
La pratique du danseur et chorégraphe Nick Coutsier s'inspire des échanges et interactions humaines, particulièrement l'intuition physique et les instincts individuels et collectifs. À la suite d'une résidence auto-organisée à Charleroi Danses en août 2023, Coutsier présente une nouvelle performance pour Notes on Fugitivity, dans laquelle il trace des notions d’assimilation et d’(in)visibilité, dans trois actes.
22:15–23:30: LIVE set / Nkisi
Musicienne et productrice reconnue, Nkisi développe un son distinctif influencé par les rythmes Kongo ancestraux, le noise rythmé, la grille électromagnétique planétaire et l'improvisation expérimentale. Elle a récemment lancé un label, INITIATION ainsi que la plateforme de recherche The Secret Institute, explorant les secrets et mystères des rythmes vibratoires, les rituels comme outils socio-politiques, les gestuelles soniques invisibles et les stratégies de transe. Inspirée par les recherches autour de la fugitivité noire, elle intervient soniquement au cours de la journée à travers des improvisations. Le soir, elle poursuit avec un set qu'elle ouvre à une myriade d'influences musicales qui fondent sa pratique, ainsi qu'à de l'écosphère naturelle.
Nick Coutsier est un danseur contemporain. Il a étudié au Conservatoire Royal Artesis Plantijn d'Anvers. En 2019, il participe au clip Spirit de Beyoncé et rejoint son film Black is King. Il collabore en tant que movement director avec l’artiste Yseult ainsi que pour différentes maisons de mode. Il travaille régulièrement avec le chorégraphe Sidi Larbi Cherkaoui dans sa compagnie Eastman. Coutsier est actuellement en tournée avec la nouvelle création VLAEMSCH (CHEZ MOI) de Cherkaoui, en collaboration avec l’artiste Hans op de Beeck et le designer Jan Jan Van Essche.
Véronique Clette-Gakuba est chercheuse en sociologie au Centre de recherche METICES de l'Université Libre de Bruxelles (ULB). Ses thématiques de recherche s'articulent autour des questions de colonialité, de négrophobie et des processus de résistance noire situés au croisement de la production artistique, de l'activisme politique et de la recherche communautaire. Sa thèse de doctorat (ULB) est intitulée "Épreuves de colonialité dans l'art et la culture. Faire exister un monde noir à Bruxelles". Véronique Clette-Gakuba est membre du collectif Présences Noires, un collectif de lutte anti-raciste.
Sofia Dati est curatrice pour les arts visuels et audiovisuels au Beursschouwburg à Bruxelles, où elle a curaté les expositions d'Ève Gabriel Chabanon, Sina Hensel, le collectif Black(s) to the Future, ainsi que des programmations de films. Elle faisait partie de l'équipe curatoriale du WIELS à Bruxelles en 2019–2021. Dati a étudié la littérature à la Sorbonne Nouvelle Paris 3, les sciences de la culture à la KU Leuven et les études curatoriales à l'Accademia di Belle Arti di Roma. Elle a écrit pour des revues telles Po&Sie, Arshake et Conceptual Fine Arts.
Magali Elali est une curatrice belge et activiste dont le travail est dédié à amplifier des voix d'artistes sous-représentés. Détentrice d'un master en histoire de l'art, elle a fondé The Constant Now en 2021, un réseau et une plateforme expérimentale qui soutient des artistes racisé.es. L'approche curatoriale d'Elali défie les formats d'exposition traditionnels et nourrit des partenariats avec des institutions telles que Hof van Busleyden et S.M.A.K. Beweegt. À travers le programme POC POC de The Constant Now, Elali accompagne des artistes émergent·es en créant des espaces inclusifs où développer et présenter leur travail.
Hamedine Kane est un artiste qui s’intéresse à l’exil, l’errance, l’héritage et la prise de conscience qui découle des expériences politiques postindépendances de certains pays d’Afrique, tout en explorant les notions d’Afro-nostalgie et d’Afro-utopie. Il a co-initié la plateforme collaborative School of Mutants à Dakar en 2018. Son travail a été exposé dans des biennales, des musées, des festivals et foires (Palais de Tokyo, Centre Pompidou, 12e Biennale de Berlin, 14e Biennale de Dakar). Il est pensionnaire de la villa Médicis 2023–2024 à Rome.
Valérie Kanza conduit des recherches depuis plus de 20 ans sur le tournant des années 40 à 60 dans les relations internationales et les processus qui ont conduit aux décolonisations. Elle poursuit le travail de mémoire face aux problématiques de l’imaginaire postcolonial, à travers l’écriture et le multimédia. Petite-fille de Daniel Kanza (ABAKO) et nièce de Thomas Kanza, elle s’est intéressée à la furtivité des réseaux d’échanges d’informations et d’entraide sous l’ère coloniale. Elle s’est notamment attachée à reconstituer la mémoire oubliée du Centre International placé sous l’égide de Présence Africaine à Bruxelles (1958–1960).
Nkisi est une artiste basée à Londres qui évolue dans les champs de l'art visuel et de la musique. Elle a co-fondé NON Worldwide, entre label et réseau, qui utilise le web pour combattre l'invisibilisation des cultures noires et africaines. Elle produit des créations et dispositifs sonores intenses et puissants influencés par d'anciens rythmes Kongo, par les rythmes noise et l'improvisation expérimentale. Elle a récemment lancé le label INITIATION et la plateforme de recherche The Secret Institute, explorant les secrets et mystères des rythmes vibratoires, le rituel comme outil socio-politique, la gestuelle sonique invisible et les stratégies de transe.
Laura Nsengiyumva est une artiviste, architecte et chercheuse. À travers sa pratique interdisciplinaire, Nsengiyumva explore des thèmes tels que l'expérience diasporique, les histoires cachées, les relations Nord-Sud et l'empathie. Ses actions artivistes comme PeoPL et Queen Nikkolah, font partie de son projet de recherche "Shaping the presence of the African diaspora in Belgium". Nsengiyumva est affiliée en tant que chercheuse artistique à KASK Conservatoire / HOGENT et Howest. Elle a remporté le premier prix du Kunstsalon de Gand en 2011, et le deuxième prix à la Biennale de Dakar en 2012.
Maria Muehombo alias M I M I est une DJ et artiste transdisciplinaire basée à Bruxelles. Son travail est motivé par une conversation constante avec la nature, puisant son inspiration à la limite des mondes naturels et de l'anthropocène. Incorporant son héritage culturel afro-européen et les pratiques shamaniques à travers divers moyens, elle mélange genres, palettes et textures pour créer un son unique et avant-gardiste. Elle s'est produite internationalement sur des plateformes reconnues telles NTS Radio, Red Light Radio, Boiler Room, Electrafrik (SEN), Nyege Nyege (UG), Eurosonic (NL), etc.
Kenny Mala Ngombe est un artiste qui explore la représentation et la perception du corps humain par la peinture, le dessin, la sculpture mais aussi la vidéo, l'animation et la création sonore. Sa pratique étudie la façon dont la fiction de l'altérité s'infiltre dans notre réalité et notre société. Inspiré du Manifeste Afro-surréaliste, Mala Ngombe tente de démêler le monde invisible du monde visible dans lequel nous fonctionnons, afin de repenser les formes et les corps. En 2022, il était en résidence au MINO à Anvers. Il a collaboré avec l'Ancienne Belgique pour le Black History Month en 2021 et participé à de nombreuses expositions en Flandres et à Bruxelles. Il est co-fondateur de Customs & Borders, un collectif d'artistes actif de 2021 à 2023, qui tentait d'élargir l'accès à l'art contemporain afro-centré.
Rachael Moore est une activiste LGBTQIA+, animatrice et experte en diversité et inclusion basée à Bruxelles. En 2018, elle co-fonde l'association Rainbow Nation, qui travaille à la promotion de la visibilité, de l'expression artistique, culturelle et civique des personnes LGBTQIA+ racisées. Elle siège actuellement au Comité de pilotage des représentant·es bisexuel·les de l'International Lesbian and Gay Association-Europe.
Cet événement a lieu au premier étage de K1. Malheureusement, cet espace n'est pas accessible aux personnes en fauteuils roulants. Nous sommes profondément désolés pour ce désagrément et nous travaillons sur cet aspect pour les événements futurs.