Strategy of Non-Cooperation VI

© Aline Bouvy, Strategy of Non-Cooperation VI, 2016. Photo: Isabelle Arthuis

L’œuvre Strategy of Non-Cooperation VI (2016) est un bas-relief figurant deux chiens en train de s’accoupler. Dans des dimensions réalistes, disposés en bas d’un mur à leur hauteur réelle, ils viennent parasiter l’espace d’exposition par leur posture triviale et non domestiquée. Aline Bouvy joue avec la symbolique des chiens errants, qui pourraient tout autant être des chats de gouttière, des pigeons ou des rats, ces animaux qui « sont devenus les thugs de la ville si on se réfère au vocabulaire propre à la dénomination de ces espèces : nuisibles, ravageuses ou invasives », souligne l’artiste. C’est par le prisme de la liberté qui caractérise ces chiens errants que le titre de cette série prend tout son sens. Dans la rue, les chiens n’en font qu’à leur tête et échappent ainsi à toute relation de domination mise en place par les hommes.

Tant par son sujet que son traitement sculptural grossier, Strategy of Non-Cooperation VI emprunte à l’esthétique du grotesque, concept littéraire hérité du Moyen-Âge étudié notamment par l’auteur russe Mikhaïl Bakhtine. A partir des écrits de François Rabelais, l’auteur s’intéresse au renversement temporaire des hiérarchies et des valeurs que permettent l’exagération absurde et grotesque. Aline Bouvy intègre quant à elle le sale, le laid et le rebut dans son processus créatif.

Strategy of Non-Cooperation VI entre ainsi en résonance avec les autres œuvres d’Aline Bouvy faisant partie de la collection de la Fondation KANAL traitant des êtres placés en marge de la société par les normes de la modernité capitaliste et patriarcale, à savoir la communauté queer, les femmes ou encore les mauvaises herbes poussant sur des terrains vagues. Cet ensemble d’œuvres évoque le cruising, pratique d’exploration et d’errance caractéristique de la communauté queer, prenant place dans des lieux publics en marge. La fluidité des genres opère également dans la matérialité de l’œuvre. La série toute entière de Strategy of Non-Cooperation est réalisée en jesmonite, matériau naturel proche du plâtre.