Page 66
Benoît Platéus fait appel à la photographie, à la vidéo, au dessin et à la sculpture pour transformer les images et espaces du quotidien, déambulant des interstices de la ville aux méandres de la psyché en susurrant une poétique de l'accident, de l'imperfection, de la trace. Déformation, saturation, éblouissement, agrandissement, effacement, renversement... mise à distance, l'image bascule de l'autre côté et s'ouvre à toutes les interprétations.
Ainsi en va-t-il notamment pour ses Pages, à travers lesquelles il fait apparaître, à l'aide de petits décalages, les potentialités picturales inexprimées des pages de livres. Agrandissement et recadrage "par addition", par exemple, permettent de faire coexister différents espaces, à l'intérieur et à l'extérieur du livre. De même, pour la série Ghostburn, il rephotographie des images d'archive en utilisant une technique d'insolation extrême, transformant les sujets éclaboussés de lumière en fantômes, comme suggéré par son nom.
Chacun y verra ce qu'il a envie de voir. "Ce qui m’intéresse, ce sont les états transitoires, qui permettent tous les possibles. J’aime bien que les choses échappent à la catégorisation, ça leur donne plus de présence, de force, ça fait apparaitre leur singularité."
D’un point de vue technique, les fonds ont une importance prépondérante. Très travaillés, ils permettent aux motifs superposés de s'ancrer tout en flottant, dans une sorte de dérive contrôlée. La maitrise semble subordonnée à la liberté, les accidents heureux définissant au fur et à mesure l’état d'avancement de l'oeuvre. Benoît Platéus emprunte volontiers toute nouvelle direction qui s'offre à lui.